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Nan Goldin.

Nan Goldin, photographie, ballades, dépendances et résilience

La franchise de Nan Goldin sa volonté d'exposer, sans filtre, sa vie et celles de ses proches a changé la façon dont la photographie est perçue et pratiquée.

Nan Goldin, les fruits de la colère

Quand il s’agit de Nan Goldin il est impossible de faire l’économie d’une biographie puisque son travail n’est autre qu’une autobiographie photographique. Ce fut la grande nouveauté de son approche d’autant plus qu’elle abordait un milieu invisibilisé, celui des marges de l’underground Bostonien puis la contre-culture new-yorkaise et le quotidien, surtout nocturne, de la communauté LGBTQ+.

Chez Goldin ce témoignage ne relève pas d’une approche extérieure et documentaire d’un milieu donné. Sa démarche n’est pas celle d’un photographe en immersion qui reporte et documente. Elle avoue elle-même que si elle a eu, dans ses années de formation, une certaine inclination pour la photographie, en réalité le médium en tant que tel lui est relativement indifférent.

Dès ses années de lycée, Nan Goldin photographie pour aller vers l’autre, pour pouvoir être présente à l’autre, pour s’exprimer suivant toutes les acceptions du terme. L’appareil photographique lui permettait de surmonter son aphasie, sa timidité, mais aussi de se faire accepter, d’être incorporée dans le groupe.

Goldin a toujours tenu un journal intime depuis son plus jeune âge, la photographie est le prolongement extraverti de cette habitude introspective. La photographe américaine répète souvent que la photographie lui a sauvé la vie en lui procurant un accès aux autres tout en témoignant auprès des autres et pour ces autres dont elle a fait sa famille réelle, élective.

Self-portrait with eyes turned inward. Boston. 1989. © Nan Goldin
Self-portrait with eyes turned inward. Boston. 1989. © Nan Goldin.

L’abandon ! Fragilité, résilience et colère

Nan Goldin (née à Washington le 12 septembre 1953) est issue d’une famille juive de la classe moyenne supérieure bostonienne. Les parents de Goldin sont très conformistes et de toute évidence peu aptes à élever des enfants.

La mère de Nancy (Nan) fut victime de maltraitance et d’abus sexuels dans son enfance. Elle éprouvait pour sa première fille Barbara puis sa petite sœur une forme de rejet probablement lié à son propre traumatisme.

Barbara, l’aînée, est très rapidement en rébellion envers sa mère et fait preuve de précocité en matière sexuelle. Les parents ne tolèrent pas sa conduite, la font suivre par des médecins et psychiatres jusqu’à la faire interner à plusieurs reprises.

A 18 ans, en 1963, alors que Nancy n’a que 11 ans, Barbara se suicide en se couchant sur les rails d’un train de banlieue. Nan Goldin qui fut davantage élevée et aimée par sa sœur que ses parents en sort si traumatisée qu’elle développe une aphasie et entre en conflit ouvert avec ses parents.

My mother laying on her bed. Salem. 2005. © Nan Goldin.
My mother laying on her bed. Salem. 2005. © Nan Goldin.

Barbara au moment de son suicide laissa dans son sac à main posé en bordure de rails cette citation de Conrad :

« Droll thing life is — that mysterious arrangement of merciless logic for a futile purpose. The most you can hope from it is some knowledge of yourself — that comes too late — a crop of un extinguishable regrets. » — Joseph Conrad, Heart of Darkness.

Nan Goldin après différentes recherches a eu accès aux comptes rendus des psychiatres qui suivaient sa sœur. Elle constata avec amertume à quel point celle qui avait pris soin d’elle avait été stimagtisée pour son indépendance et sa précocité sexuelle à l’orientation lesbienne.

Note des psychiatres dans les feuillets de suivi de Barbara Goldin : « She wants to solve her difficulties with her daughter by eliminating her from her life. » « The patient has the normal attitude of an adolescent girl. However, she does not receive the parental support. »

Nan Goldin fait alors ce constat désolant: « Mes parents n’étaient pas équipés pour être parents. Ils ont eu des enfants parce qu’il le fallait bien, pas pour prendre soin d’autres êtres humains.»

Self-portrait in bed with Siobhan.NYC.1990. © Nan Goldin.
Self-portrait in bed with Siobhan.NYC.1990. © Nan Goldin.

Les invisibles, Nan Goldin témoigne

A 15 ans, Nan Goldin quitte le domicile familial. Après avoir été renvoyée de plusieurs établissements scolaires, elle est scolarisée à la Satya Community School de Lincoln (Massachusetts), une école alternative, où elle découvre la photographie et fait une rencontre décisive pour la suite de son évolution personnelle et d’artistique en la personne de David Armstrong qui lui dévoile le monde des drag queens et la persuade d’approfondir sa pratique de la photographie.

Cette communauté des invisibles, des réprouvés de la « bonne société », sera dès lors pour Nan Goldin sa véritable famille, où elle se reconnaît dans le sentiment d’avoir été avec sa sœur des personnes à la singularité inacceptable. Elle y trouve un lieu où exprimer sa revolte face au conformisme, l’étroitesse d’esprit, ou le cynisme des dominants.

Chez Nan Goldin on retrouve les traits d’une autre femme, stigmatisée et révoltée, fragile et résiliente, Griselidis Réal, qui toute sa vie durant à revendiquer son droit à la différence, en tant que professionnelle de la prostitution, marginale, hors des conventions.

A l’image de Réal qui usa de la littérature pour « venger sa race » (cf Ernaux), celle des exclus, des inassimilables, Goldin trouva dans la photographie un moyen d’être présente aux autres et de témoigner avec compassion et colère contre la néantisation des puissants et des bien pensants.

Les œuvres de Goldin vont au-delà de la simple représentation de la marginalité; elles constituent une forme de résistance contre la stigmatisation et l’exclusion. En mettant en lumière des individus et des comportements souvent jugés ou mal compris, Goldin remet en question les normes sociales et culturelles dominantes. Ses photographies célèbrent l’individualité et la diversité, offrant des contre-narratifs puissants aux récits mainstream.

Cette démarche artistique est particulièrement pertinente dans le contexte de la crise du SIDA, où Goldin utilise son art comme un outil de sensibilisation et de lutte contre l’ostracisation des personnes atteintes.
Jimmy Paulette & Misty in a taxi. NYC. 1991. © Nan Goldin.
Jimmy Paulette & Misty in a taxi. NYC. 1991. © Nan Goldin.

La photographie des marges

A Boston, elle suit une formation à la Boston School of the Museum of Fine Arts puis s’installe à New York en 1977 où elle s’intègre immédiatement dans le milieu underground de l’époque.

Suivant des cours du soir, elle découvre des photographes qui tels que Larry Clark, Diane Arbus avaient déjà rendu compte sans afféterie des marges. Elle fut également marquée par la découverte du travail d’August Sander pour la part documentaire et Weegee pour sa description de la violence urbaine.

Pour subvenir à ses besoins et notamment se fournir en pellicule et pouvoir assurer le développement et les tirages photographiques, Nan Goldin sera serveuse au Tin Pan Alley, un bar de Times Square tenu par des femmes où voyou, artistes, et autres marginaux s’abreuvent toute la nuit dans une ambiance souvent survoltée, voire éruptive. Elle fut également gogo dancer, et durant période prostituée dans un bordel tenu par une tenancière intraitable.

Nan Goldin, photographie des marges
© Nan Goldin

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Nan Goldin, photographie des marges
© Nan Goldin

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Nan Goldin, photographie des marges
© Nan Goldin


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Marge et Contre-culture, Larry Clark, Peter Hujar et Nan Goldin

Larry Clark, avec son travail emblématique “Tulsa” (1971), a exercé une influence notable sur Goldin. Clark a capturé la vie des adolescents dans l’Oklahoma, se concentrant sur leurs expériences avec les drogues, le sexe et la violence.

Ce regard sans concession sur la jeunesse et la contre-culture résonne dans l’œuvre de Goldin, qui documente également les réalités parfois crues de l’existence de ses amis et de sa communauté à New York. La capacité à rendre compte de la vie sans embellissement ou censure est un trait marquant de l’influence de Clark sur Goldin.

Larry Clark, célèbre pour son travail documentaire sur la jeunesse, la drogue et la contre-culture, a exercé une influence notable sur Goldin. Son livre “Tulsa” (1971), une étude photographique crue de ses amis toxicomanes dans sa ville natale, a marqué un tournant dans la photographie documentaire. Clark a capturé avec un réalisme sans précédent la vie de ces jeunes, incluant des scènes de consommation de drogues, de violence et de sexualité. Pour Goldin, qui a également gravité autour de communautés marginales et documenté sans filtre la réalité de l’addiction, la sexualité et la violence, l’œuvre de Clark a servi de référence importante. Elle a vu en lui un modèle pour documenter sans concession la réalité de son propre cercle social, tout en maintenant une profonde empathie pour ses sujets.

Nan Goldin, images de l'underground

Peter Hujar, quant à lui, est reconnu pour ses portraits intimes et souvent mélancoliques de figures de la scène underground new-yorkaise, notamment des artistes, des écrivains et des membres de la communauté LGBTQ+. Son approche, caractérisée par une grande sensibilité et un respect profond pour ses sujets, a trouvé un écho particulier chez Goldin.

Hujar a su capturer la complexité des identités et des relations au sein de ces communautés avec une honnêteté et une intimité qui ont profondément influencé Goldin. Son portrait de la communauté LGBTQ+ à une époque où cette dernière faisait face à une marginalisation et une stigmatisation importantes a sans doute contribué à la démarche empathique de Goldin dans ses propres portraits de la scène new-yorkaise.

© Kiki Smith, Party at Tin Pan Alley, Xerox Flyer, 1983
© Kiki Smith, Party at Tin Pan Alley, Xerox Flyer, 1983

La scène new-yorkaise

Dans les années 1970, Goldin déménage à New York, un mouvement qui marque le début d’une période prolifique et déterminante de sa carrière.

Immergée dans la scène artistique et nocturne du Lower East Side, elle documente sans relâche la vie de ses amis et connaissances, construisant une vaste archive visuelle de son entourage. Ces photographies, intimes et sans fard, deviennent le fondement de sa célèbre série “The Ballad of Sexual Dependency” (1986), un diaporama de près de 700 images qui explore les complexités des relations humaines, l’amour, le sexe, et la violence domestique, dans le cadre d’un New York en pleine transformation.

Les années 1970 et 1980 à New York représentent une période de profonde transformation sociale, politique et économique, marquant la ville de manière indélébile. Cette époque a été caractérisée par une série de crises et de révolutions culturelles qui ont façonné l’identité de New York comme un centre de la contre-culture, d’innovation artistique et de contestation sociale.

Les années 70 à New York ont été marquées par une grave crise économique. La désindustrialisation, la fuite des classes moyennes vers les banlieues et une gestion municipale souvent critiquée ont plongé la ville dans une situation financière désastreuse, culminant avec la quasi-faillite de New York en 1975. La réduction des services publics, notamment dans les domaines de la sécurité, de la santé et de l’éducation, a contribué à une détérioration urbaine notable, avec une augmentation de la criminalité, des terrains vagues et des bâtiments abandonnés. Cette période a également été marquée par des coupures de courant mémorables, dont le blackout de 1977, qui a déclenché des émeutes et du pillage, illustrant le désespoir et la colère de certaines populations.

Nan Goldin, La scène new-yorkaise
© Nan Goldin

Malgré ces défis, ou peut-être à cause d’eux, New York est devenue un creuset de mouvements sociaux et de contre-culture. La ville a vu l’émergence de mouvements importants pour les droits civiques, les droits des femmes, et surtout, les droits LGBTQ+, symbolisés par les émeutes de Stonewall en 1969. Ces mouvements ont revendiqué plus de liberté et d’égalité, défiant les normes sociales conservatrices et ouvrant la voie à des changements législatifs et sociétaux majeurs.

Le New York des années 70 et 80 était également un centre vibrant pour l’art et la musique, avec l’émergence de scènes punk, new wave, et hip-hop dans des clubs légendaires comme le CBGB et Studio 54. Des artistes visuels comme Andy Warhol, Jean-Michel Basquiat et Keith Ha-ring, ainsi que des photographes comme Nan Goldin, ont capturé l’esprit de cette époque, explorant des thèmes de marginalité, d’identité et d’urbanité.

Les années 70 ont vu l’ascension du graffiti comme une forme d’art à part entière, avec des artistes tels que Lee Quiñones et Fab 5 Freddy qui ont commencé à transformer les métros et les murs abandonnés de la ville en toiles pour leurs œuvres. Ce mouvement, souvent associé à la contre-culture et à la rébellion, a non seulement contesté les notions traditionnelles d’espace public et privé, mais a aussi élevé le graffiti en une forme artistique reconnue.

Photographie de Nan Goldin
© Nan Goldin

Dans les années 80, le Bad Painting, a marqué un retour à la peinture figurative et expressive, souvent à grande échelle, avec des artistes comme Jean-Michel Basquiat et Julian Schnabel. Ces œuvres, caractérisées par leur intensité émotionnelle et leur critique sociale, ont réintroduit l’humanité et la subjectivité dans l’art, en réaction à l’abstraction et au minimalisme des décennies précédentes.

Par ailleurs, à son arrivée à New York à la fin des années 1970, Goldin plonge dans un monde où la musique punk, rock et new wave forme le cœur battant de la contre-culture. Les groupes et les artistes de ces genres musicaux ne sont pas seulement la bande-son de cette période; ils incarnent aussi une rébellion contre les normes sociales et artistiques établies, une résonance parfaite avec l’approche photographique de Goldin. Les clubs et les bars du Lower East Side, tels que le CBGB, où se produisent des groupes emblématiques comme The Ramones, Television, et Blondie, deviennent des lieux de prédilection pour Goldin. Ces espaces, empreints de liberté et d’expérimentation, offrent à Goldin un terrain fertile pour ses explorations artistiques. La Musique comme Expression de la Contre-Culture

La scène punk et new wave de New York, avec des groupes tels que Talking Heads, Patti Smith Group, et The Velvet Underground, reflète une période de transition et de contestation. La musique de ces artistes, caractérisée par son énergie brute, son esthétique DIY et ses paroles souvent chargées de critique sociale, trouve un écho dans le travail de Goldin, notamment comme bande son occasionnelle de son diaporama “The Ballad of Sexual Dependency”.

Les photographies de Goldin capturent l’intimité, la complexité et parfois la désolation des vies menées à la marge de la société, tout en célébrant leur beauté inhérente et leur résilience. New York et son effervescence culturelle contituent pour elle un creuset idéal.

Patti Smith et Robert Mapplethorpe © Norman Seef. 1969.
Patti Smith et Robert Mapplethorpe © Norman Seef. 1969.

C’est notamment à New York, dans les années 1980, que la relation de Goldin avec la musique prend une nouvelle dimension. Le Lower East Side devient son terrain de jeu et de travail, un lieu où la musique punk, new wave et no wave résonne dans chaque rue et chaque club. Les performances musicales, les soirées dansantes et les personnalités de la scène musicale deviennent des sujets fréquents dans son œuvre. Pour Goldin, la musique n’est pas seulement un fond sonore ; elle est un élément vital qui évoque l’intensité émotionnelle et l’urgence de l’existence.

Nan Goldin, une esthétique de l’urgence, de l’intime et de l’immédiateté

L’esthétique de Nan Goldin est caractérisée par une crudité émotionnelle et une immédiateté qui va au plus intime de l’expérience humaine. Ses photographies, souvent saturées de couleurs vives et prises dans des conditions de faible luminosité, capturent des moments de vulnérabilité, de désir, de solitude et de douleur avec une authenticité brute. Goldin utilise la photographie non pas pour embellir ou idéaliser, mais pour documenter la réalité de la vie telle qu’elle est vécue par elle-même et son entourage. Immédiateté et Intimité.
Nan Goldin, une esthétique de l’urgence, de l’intime et de l’immédiateté
© Nan Goldin

L’un des aspects les plus frappants du travail de Goldin est son utilisation de l’immédiateté. Ses images donnent l’impression que le spectateur entre sans préavis dans les vies privées des sujets, créant une intimité intense. Cette sensation est renforcée par l’utilisation fréquente du flash, qui, loin d’aplatir ou de dénaturer, révèle les détails et les textures de chaque scène avec une clarté impitoyable. Cette approche directe est à la fois une technique esthétique et un moyen d’expression éthique, refusant de masquer les imperfections ou de tourner le regard loin des réalités parfois dures de la vie.

Les photographies de Goldin sont remarquables pour leur utilisation riche et réfléchie de la couleur. Les teintes souvent saturées renforcent l’émotion de chaque image, qu’il s’agisse de la chaleur d’une étreinte ou de la froideur de la solitude. Sa composition, bien que semblant spontanée, est minutieusement construite pour guider l’œil à travers l’image, créant des narrations visuelles complexes qui communiquent bien au-delà des sujets immédiats.

Nan Goldin, une esthétique de l’urgence, de l’intime et de l’immédiateté
© Nan Goldin

Deuil, amour, communauté, addiction, dépendance et autonomie

Au cœur du travail de Goldin se trouve une exploration constante des thèmes de la rupture et de la résilience. Ses photographies dépeignent souvent des moments de tension, de désintégration relationnelle, mais aussi de profonde affection et de résilience humaine. Cette dualité est essentielle à la critique esthétique de son œuvre, car elle reflète la complexité de la condition humaine, oscillant entre désespoir et espoir, isolement et connexion. Un Miroir de la Société

Les images de Goldin fonctionnent comme un miroir de la société, révélant des aspects de la vie souvent marginalisés ou ignorés par les médias traditionnels. En documentant la vie de la communauté LGBTQ+, des scènes de vie nocturne et des sous-cultures, elle offre une perspective rare et précieuse sur des expériences de vie diverses. Cette documentation agit comme un acte politique, affirmant l’existence et la valeur de vies souvent invisibilisées.

“I’m bisexual so I can’t really come out as gay. When I’m gay I’m very gay. And when I’m with men then, you know, I’m with men. I don’t fall in love with people because of their gender.” - Nan Goldin

Amanda on my Fortuny, Berlin, 1993. © Nan Goldin.
Amanda on my Fortuny, Berlin, 1993. © Nan Goldin.

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Nan Goldin photography
© Nan Goldin

L’œuvre de Goldin ne se limite donc pas à la représentation artistique; elle est également un outil d’activisme. Face à la crise du SIDA, Goldin a utilisé sa plateforme pour sensibiliser et mobiliser. En documentant ouvertement la vie et la mort au sein de la communauté homosexuelle, elle a contribué à humaniser la crise, à générer de l’empathie et à exiger une action politique et médicale. Ses photographies, souvent déchirantes, ont joué un rôle crucial dans la lutte pour la reconnaissance et les droits des personnes atteintes du VIH/SIDA.
Gotscho kissing Gilles, Paris, 1993. © Nan Goldin.
Gotscho kissing Gilles, Paris, 1993. © Nan Goldin.

La franchise de Goldin, sa volonté d’exposer sa propre vie et celles de ses proches avec une telle vulnérabilité, a changé la façon dont la photographie est perçue et pratiquée.

Au fil des ans, Goldin a continué à travailler sur des projets personnels tout en luttant contre ses propres démons, y compris une dépendance à l’héroïne dans les années 1980. Malgré ses luttes personnelles, ou peut-être à cause d’elles, le travail de Goldin est resté poignant, puissant et pertinent.

Elle est devenue une activiste, en particulier en réponse à la crise du SIDA dans les années 1980 et 1990, utilisant sa photographie comme un outil pour documenter et sensibiliser à la maladie et à ses impacts sur la communauté LGBTQ+. Plus récemment Nan Goldin s’est engagée dans une lutte acharnée et globalement couronnée de succès contre la famille Sackler, qui commercialise l’OxyContin, un antidouleur particulièrement addictif dont elle a elle-même subi l’emprise.

En documentant sa vie et celles de son cercle intime avec une honnêteté désarmante, Goldin a non seulement capturé des moments d’intimité rare, mais a également repoussé les limites de la photographie comme forme d’art personnel et politique.
Photographie: Nan Goldin
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Photographie: Nan Goldin
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Photographie: Nan Goldin
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Repères chronologiques

1953: Naissance le 12 septembre à Washington, D.C.

1965: Suicide de sa sœur Barbara Holly Goldin, un événement qui influencera profondément son travail.

1971: Commence à photographier ses amis et sa famille, documentant sa vie quotidienne.

1974: Déménage à Boston pour étudier à la School of the Museum of Fine Arts.

1978: S’installe à New York, où elle se plonge dans la scène post-punk et new wave, dé butant son projet emblématique “The Ballad of Sexual Dependency”.

1986: Publication de “The Ballad of Sexual Dependency”, consolidant sa réputation comme une figure majeure de la photographie documentaire.

1996: “I’ll Be Your Mirror”, une rétrospective significative de son travail, est exposée au Whitney Museum of American Art.

2001: “The Devil’s Playground”, sa plus grande exposition monographique à ce jour, est présentée à la Fondation Cartier, Paris.

2003: Présente “Sisters, Saints, and Sibyls” au Centre Pompidou, une installation vidéo personnelle sur sa sœur.

2007: Participe au Festival de la Photographie à Arles avec “Slide Shows”, un assemblage de ses diaporamas.

2010: “Scopophilia” est exposé au Stedelijk Museum, explorant le plaisir de regarder.

2014: “Wish You Were Here” à la Galerie Yvon Lambert offre une vue d’ensemble de son œuvre, mêlant anciennes et nouvelles photographies.

2018: Le MoMA présente une nouvelle installation de “The Ballad of Sexual Dependen-cy”, réaffirmant son importance dans le paysage photographique contemporain.

2019: “Memory Lost”, une installation vidéo à la Marian Goodman Gallery, plonge dans les thèmes de la mémoire et de l’oubli.

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Nan Goldin photographies
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Nan Goldin photographies
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Documentaire de Laura Poitras sur le combat de Nan Goldin contre la famille Sackler


Publié le: 02-07-2024

Par: Thierry Grizard

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